Keetie van Oosten-Hage a remporté le premier de ses deux titres mondiaux de la course en ligne lors des Championnats du Monde Route UCI 1968 d’Imola, sur un parcours très différent de celui de l’édition 2020 à venir. Cette victoire, intervenue 10 jours après son 19e anniversaire, a marqué le début d’une carrière brillante pour la coureuse néerlandaise qui est devenue l’une des plus grandes championnes cyclistes, capable de gagner sur tous les terrains, sur route et sur piste, et qui a dominé les épreuves nationales et continentales durant plus d’une décennie.
Keetie van Oosten-Hage, de son vrai prénom Cornelia, est née à Sint-Maartensdijk, dans la Zélande, et a grandi dans une famille cycliste avec ses sœurs Bella, Heleen et Ciska. Elle vivait à Imola ses deuxièmes Championnats du Monde UCI après l’édition 1966 du Nürburgring, en Allemagne, dont elle avait remporté la médaille d’argent à seulement 17 ans. Mais le chemin vers son premier maillot arc-en-ciel n’a pas été facile.
Après avoir fêté son 19e anniversaire le 21 août, Keetie van Oosten-Hage a remporté sa première médaille de bronze dans la poursuite individuelle, lors des Championnats du Monde Piste UCI de Rome. Mais à peine deux jours plus tard, elle est impliquée dans un accident à l’entraînement, heurtant une camionnette et se déchirant un ligament du petit doigt. Par une heureuse coïncidence, le soigneur du coureur italien Gianni Motta passait par là et la ramena à l’hôtel où elle fut soignée et son doigt recousu. A la veille du grand événement du 31 août, Keetie van Oosten-Hage n’a pas eu la nuit de repos qu’elle espérait à cause de quelques colocataires bruyants. Elle n’a pu se reposer que le matin alors que la course avait lieu l’après-midi.
Dix ans après les premiers Championnats du Monde Route UCI féminin, organisés à Reims (France) en 1958, Imola a accueilli les courses arc-en-ciel avec un parcours qui se terminait dans l’actuel Autodromo Internazionale Enzo et Dino Ferrari après 55,19 km. Keetie van Oosten-Hage a disputé les Championnats du Monde Route UCI 1968 sous le nom de Cornelia Hage car elle n’était pas encore mariée.
A première vue, elle avait trouvé le parcours beaucoup trop facile à son goût : « J’aurais préféré qu’il soit plus vallonné, nous a confié Van Oosten-Hage. J’avais l’habitude de beaucoup attaquer, mais comme le parcours était vraiment plat et que je craignais encore mes rivales plus expérimentées, je n’ai pas attaqué pendant la course autant que je le faisais normalement. »
Cette stratégie plus attentiste, contrastant avec son tempérament juvénile et courageux, a été importante pour aider Van Oosten-Hage à économiser une énergie précieuse pour le final.
A l’approche de la ligne d’arrivée de l’Autodrome, quinze coureuses étaient toujours ensemble : « Je n’avais personne de spécial à surveiller. Je ne connaissais pas vraiment les autres, je n’avais jamais roulé contre certaines filles. Je n’ai donc pas cherché un côté particulier de la route ou quoi que ce soit. J’ai juste sprinté. Quand je suis arrivé en tête, il restait encore un long chemin à parcourir, c’était vraiment difficile. »
Le public a assisté à une première partie de sprint très incertaine, avec au moins sept coureuses sur la même ligne. Puis dans les derniers mètres, le groupe de tête s’est réduit à cinq athlètes, et l’une d’elles a saisi l’occasion tête baissée. Finalement, Keetie van Oosten-Hage a gagné avec un avantage d’un demi-vélo. « J’avais mal aux jambes et je pensais que quelqu’un me dépasserait, mais personne ne l’a fait ».
Après être devenue la première Néerlandaise à monter sur le podium des Championnats du Monde Route UCI, en 1966 avec une médaille d’argent, elle a offert à son pays sa première médaille d’or chez les femmes. Le maillot arc-en-ciel a été le début d’une brillante carrière.
Jusqu’en 1971, Keetie van Oosten-Hage allait à l’Université où elle étudiait le design textile et ne s’entraînait que le soir, mais cela ne l’a pas empêchée de devenir Championne Nationale de poursuite douze fois de suite entre 1966 et 1977. Elle a également remporté le Championnat Néerlandais sur route huit fois consécutivement de 1969 à 1976, puis à nouveau en 1978 pour la neuvième fois.
Van Oosten-Hage a été Championne du Monde UCI de la poursuite individuelle à quatre reprises (1975, 76, 78 et 79) et une deuxième fois Championne du Monde UCI sur route en 1976, à nouveau en Italie. Cette fois-là, la course s’était déroulée à Ostuni et s’était conclue par un sprint plus massif qu’à Imola, remporté de quelques longueurs.
Son palmarès compte plus de 200 victoire dont celles des deux premières étapes des Driedaagse van Zeeland et son classement final en 1973, deux victoires à l’Omloop van het Westerkwartier (1976, 1978), un autre doublé sur l'Omloop van de Krimpenerwaard (1977, 1979) et la Red Zinger Bicycle Classic aux Etats-Unis en 1978. Tout cela dans une période qui comptait très peu de courses internationales et aucune épreuve olympique féminine. Keetie van Oosten-Hage a également établi un nouveau Record de l’Heure avec une distance de 43,082 km, à Munich le 16 septembre 1978, battant dans le même temps les records du monde sur 5, 10 et 20 kilomètres.
Témoignage de l’impact de Van Oosten-Hage sur l’histoire du sport aux Pays-Bas, l’organisation qui lui a remis le prix de la sportive néerlandaise de l’année en 1976 et 1978 a par la suite décidé que le trophée qu’elle remet chaque année à la meilleure cycliste porterait son nom.
Suivant la tradition familiale, le neveu de Keetie Van Oosten-Hage, Jan Van Velzen, est devenu coureur professionnel. Il a notamment disputé le Giro d’Italia en 2004.