Compétitions virtuelles pour tous, champions et fans

Juillet sans le Tour de France n’est pas vraiment juillet. En attendant le Grand Départ de Nice le 29 août, Amaury Sport Organisation (ASO), Zwift et les meilleures équipes féminines et masculines se sont donc associés pour proposer une édition virtuelle de la course, avec six étapes disputées lors des week-ends de juillet.

L’équipe Tibco-Silicon Valley Bank mène la course féminine après les victoires d’April Tacey (Drops Cycling Team) et Lauren Stephens (Tibco-Silicon Valley Bank) dans les deux premières étapes. Chez les hommes, Ryan Gibbons a remporté la 1re étape, et son équipe NTT Pro Cycling Team a conservé la tête du classement général après la victoire de Julien Bernard (Trek-Segafredo) dans la 2e étape. La course reprend le samedi 11 juillet.

D'autres organisateurs comme ceux du Tour des Flandres (avec Bkool), du Tour de Suisse (avec Rouvy) ou du Giro d'Italia (avec Garmin) ont déjà déplacé leurs événements vers des plateformes numériques pour offrir des courses virtuelles aux fans pendant que les événements réels étaient suspendus.

« Les courses virtuelles ont été un super moyen pour les cyclistes de continuer à courir et de maintenir la forme qu'ils avaient acquise en vue des Classiques du printemps et d'autres courses du calendrier », explique Hannah Walker. Ancienne professionnelle avec le Team WNT (devenue depuis CERATIZIT – WNT Pro Cycling), elle est restée proche du peloton depuis sa retraite de coureuse et commente des événements Zwift. « Ces derniers mois, on a travaillé sur les Zwift Classics, le Tour of Watopia... C'était génial de voir les coureurs venir de la route, ou d'autres sports comme le triathlon, pour découvrir le monde de Zwift. »

Le Champion de France 2018 de cyclo-cross Steve Chainel, qui courait aussi sur route jusqu'à son départ de l’UCI WorldTeam Cofidis en 2015, était moins familier des courses virtuelles avant le confinement, mais il s'est rapidement mis à jour avant de commenter le Tour for All sur Eurosport.

« J'ai regardé les premières courses virtuelles parce que je me doutais qu'Eurosport suivrait le mouvement, et que les autres consultants – Jacky Durand [vainqueur du "vrai" Tour des Flandres en 1992] et David [Moncoutié, vainqueur de six étapes de Grands Tours] – n'étaient pas les plus grands fans de watts et de jeux vidéo, raconte-t-il. J'étais très réfractaire, et puis je suis rentré dedans et j'ai pris beaucoup de plaisir en pratiquant et en commentant. On s'empare d'éléments comme les watts, le pourcentage ou le poids, pour expliquer la performance, l'aspiration, et tout le système de bonus qui en fait un jeu. »

Les courses virtuelles n'ont peut-être pas séduit tout le monde dans le cyclisme mais elles ont sans aucun doute bénéficié d'un engouement nouveau avec les restrictions récemment imposées en matière de rassemblements publics. « Il n'y avait pas de sport, pas de cyclisme à la télé, alors les gens ont essayé et ils se sont pris au jeu, se réjouit Hannah Walker. Dans cette période, c'était un moyen de penser à autre chose et de voir des cyclistes. A l'avenir, même lorsque les courses reprendront à l'extérieur, je pense que le cyclisme virtuel gardera une place importante. »

Avec des plateformes accessibles à domicile partout dans le monde, les organisateurs s’adressent aussi bien aux professionnels qu’aux amateurs. A la fin du Giro d’Italia Virtual by Enel, RCS comptait plus de 10’000 participants aux côtés de stars d'aujourd'hui (dont l’Italien Elia Viviani et la Britannique Lizzie Deignan) et d'hier (comme les Italiens Alessandro Ballan ou Ivan Basso). Leurs vidéos sur les réseaux sociaux ont été vues plus de 2,5 millions de fois dans le cadre d'un événement qui soutenait une levée de fonds en faveur des initiatives de la Croix Rouge italienne.

« Ce qui est génial, c’est de pouvoir comparer tout le monde : un gamin de 16 ans à un adulte de 60 ans, un coureur professionnel à un amateur ou à un triathlète…, s’enthousiasme Steve Chainel. ça peut devenir une pratique et une discipline à part entière pour les gens qui veulent disputer une course et s’amuser le soir après le travail, et pour les spécialistes. Si un sponsor apporte de l'argent et décide de créer un challenge international avec de grosses récompenses, ça peut vite attirer de très bons coureurs et faire un format très intéressant pour la télé et pour les partenaires. »

Steve Chainel a été particulièrement impressionné par les performances du Suisse Stefan Küng (Groupama-FDJ) pendant le confinement ; il relève aussi que le Tour for All était le même pour les hommes et les femmes. « Cela peut inspirer les organisateurs de courses sur route», estime-t-il.

«  Ashleigh Moolman-Pasio était incroyable sur le Tour for All, après avoir passé des heures et des heures sur Zwift à cause du confinement en Espagne, observe Hannah Walker, avant d'ajouter : c'est quelque chose que Zwift a toujours fait, avec des séries pour les hommes et les femmes tout au long de l'année. Il y a toujours eu la même production et la même couverture. Ça montre le chemin vers l'égalité. »

Jusqu’au 19 juillet, le Tour de France virtuel suivra le même chemin avec des étapes d'une heure pour les hommes et les femmes, qui ne peuvent pas courir côte à côte dans le monde réel mais peuvent toujours s'affronter et divertir les fans sur des courses virtuelles.