Pour beaucoup de spectateurs et de compétiteurs, les officiels sont invisibles... jusqu'à ce qu'il y ait un problème ! Mais tout sport a besoin d'une équipe dédiée au bon déroulement des événements. Comprendre le travail des Commissaires permet de mieux comprendre les courses de mountain bike. L'Autrichienne Michaela Nussbaumer, Commissaire Mountain Bike UCI, nous emmène en coulisses...
Michaela, sur quels événements travaillez-vous ?
Michaela Nussbaumer (MN) : En 2013, j'ai commencé à travailler sur plusieurs spécialités – cross-country olympique (XCO), cross-country Marathon (XCM) et descente (DHI) – dans différents pays et à différents niveaux, les courses C3 à C1 et Hors-Catégorie, en tant que Commissaire Internationale Mountain Bike.
J'ai eu l'honneur de faire partie de l'équipe sur la manche de Coupe du Monde UCI de Lenzerheide et des Championnats du Monde UCI 2018 de Lenzerheide, ainsi que d'être Commissaire Nationale sur plusieurs événements de haut niveau en Autriche, notamment des manches de Coupe du Monde à Leogang, les Championnats du Monde UCI de Saalfelden/Leogang et les Championnats du Monde Mountain Bike Marathon UCI de Kirchberg/Tyrol.
J'ai été pour la première fois Présidente du Jury des Commissaires en Coupe du Monde en 2016 à Fort William (Grande-Bretagne), puis à Lourdes (France), Andorre et Nove Mesto na Morave (République tchèque). J'ai vécu un autre grand moment en tant que Présidente du Jury aux Mondiaux de Mont-Sainte-Anne (Canada) en 2019 et lorsque j'ai été nommée pour les Jeux Olympiques de Tokyo 2020. C'était un rêve secret que je ne m'attendais pas à voir se réaliser.
De quoi êtes-vous responsable sur les courses ?
MN : Un Commissaire est un représentant de l'UCI et il doit pouvoir interpréter et appliquer les règlements tout en gérant l'aspect sportif. Le Président du Jury occupe une position centrale pour l'équipe d'organisation, les collaborateurs de l'UCI, le Jury des Commissaires et ceux qui sont impliqués sur une course comme les équipes, les coureurs et les médias. A la fin de la course, le Commissaire établit un rapport et évalue l'événement.
Racontez-nous les étapes à suivre sur les grands événements...
MN : La première étape est de contacter l'organisateur avant l'événement et de vérifier que tout a été fait pour garantir une course sans problèmes. Cela concerne avant tout la sécurité.
Un Commissaire assiste aux réunions et aux briefings avec le coordinateur des officiels et des bénévoles. Il y a une inspection du tracé avec le responsable du parcours, le chronométreur... et il est aussi important de travailler avec l'équipe médicale de premiers soins, parce que les services d'urgences sont différents selon les pays. Pendant la course, la communication radio entre les différentes parties est un autre point essentiel, et il faut déterminer comment la mettre en place de façon efficace.
Comme Président du Jury, vous ne pouvez pas tout faire pendant un événement, alors ces missions sont réparties entre les membres du Jury des Commissaires. Ils doivent contrôler les autres éléments qui ont une influence sur le résultat, à l'image des Commissaires de départ et d'arrivée. Ils sont responsables de l'appel des coureurs, de la vérification des équipements et de l'ordonnancement du départ. Parmi les autres missions, il faut enregistrer le nombre de tours et préparer les résultats, qui sont comparés avec ceux du chronométreur. Il y a aussi le contrôle des zones de ravitaillement et techniques dans les courses de XCO et de XCM, la supervision de passages techniques spécifiques sur les pistes de XCO, de XCE, de XCC et de DHI, et être en contact avec le Président du Jury qui contrôle la course et prend les décisions en cas d'incidents.
Comment avez-vous appris ce rôle ?
MN : Avant de devenir Commissaire International, on commence au niveau national. Là, on acquiert de l'expérience, et votre Fédération Nationale peut vous autoriser à aller à un niveau supérieur. La deuxième étape, c'est de devenir Commissaire International. Les deux statuts sont attribués par l'UCI après des sessions de formation, des examens oraux et écrits, et des stages avec d'autres Commissaires sur le terrain. Vous devez aussi confirmer votre volonté de vous investir dans une formation continue et de participer à des séminaires. Durant tout le processus, vous apprenez avec vos collègues, assistez aux courses et essayez d'occuper toutes les positions dans votre propre pays. L'UCI dispose d'un système lui permettant d'évaluer les capacités des Commissaires lorsqu'ils travaillent sur un événement.
Quelles sont les différences entre votre travail sur une épreuve de Coupe du Monde UCI et sur d'autres épreuves de moindre niveau ?
MN : D'un côté, plus le niveau de la course est élevée et plus il y a de pression et d'attentes ; mais en même temps l'équipe d'experts internationaux est plus grande, avec davantage de Commissaires, un Délégué Technique UCI officiel, un Secrétaire UCI. On ne retrouve pas un tel dispositif sur de plus petites courses. Dans ces courses, le Commissaire est souvent un nouveau venu dans le groupe, et il faut donc faire preuve de capacités d'analyse, d'aptitudes sociales, de bon sens, d'instinct et savoir négocier.
Quelles sont les différences sur un événement de XCM ?
MN : Les courses de XCM ne sont pas vraiment plus difficiles pour les Commissaires. Mais elles représentent un plus grand défi pour les organisateurs, qui ont besoin de plus de monde pour couvrir toute la distance du XCM avec des bénévoles responsables pour assurer le bon déroulement de l'événement.
Vous travaillez également sur des courses d'E-mountain bike et d'Eliminator ?
MN : Les premiers Championnats du Monde E-Mountain Bike UCI ont été organisés avec succès à Mont-Sainte-Anne en 2019. Si on compare à d'autres disciplines et formats neufs, il y a eu des nouveautés et des améliorations au niveau des règlements et du contrôle des vélos.
Nous devons vérifier les E-mountain bikes avant et après la course. On a besoin pour cela d'un parc fermé, et les Commissaires auront d'autres missions à l'avenir. Les fabricants développent actuellement des modèles de pointe pour diminuer leur poids.
L'E-mountain bike est très populaire ; les deux-tiers des vélos vendus dans mon pays [l'Autriche] sont à assistance électrique. Les gens sont très intéressés à participer à des compétitions et l'intérêt sera croissant à l'avenir.
Les courses d'Eliminator amènent le mountain bike en ville. C'est important que les courses soient présentes dans l'esprit de gens qui n'auraient pas envisagé d'organiser un événement de mountain bike ou de s'impliquer dans une telle manifestation. Cela montre également que les événements peuvent être organisés n'importe où. Et le public jeune aime ce format court et spectaculaire.
Quelle est la partie que vous préférez dans votre activité ?
MN : Travailler avec l'équipe des Commissaires, du départ de la course au moment où le vainqueur franchit la ligne d'arrivée !
Et ce qui est le plus difficile ?
MN : Travailler dans de mauvaises conditions météo, lorsque le terrain évolue de minute en minute, pour maintenir la sécurité afin que les coureurs puissent finir la course.
Quel conseil donneriez-vous à ceux qui voudraient emprunter la même voie que vous ?
MN : En premier lieu, être passionnés. Vous devez aimer ce sport. Ensuite, la persévérance. Parfois il faut donner plus que 100 % : vous êtes le premier et le dernier membre de l'équipe sur le site. Vous devez avoir faim de connaissances, ne jamais cesser d'apprendre, de réfléchir et d'apprendre de vos erreurs, vous former dans la pratique et trouver les mentors qui répondront à vos questions, que vous pourrez accompagner et desquels vous apprendrez.