Eyeru Tesfoam Gebru : la porteuse de flamme olympique du Centre Mondial du Cyclisme UCI

Nous nous sommes entretenus avec l'ancienne stagiaire du Centre Mondial du Cyclisme UCI à la suite de l'annonce par le Comité International Olympique (CIO) qu'elle sera l'une des porteuses de la flamme olympique de Paris 2024.

Hier, le Comité International Olympique (CIO) a confirmé 80 % des porteurs de la flamme olympique et paralympique de Paris 2024. Parmi eux, l'Ethiopienne Eyeru Tesfoam Gebru, désignée par le département français du Calvados. L’aventure cycliste de la jeune athlète se poursuit.

C'est une aventure pleine de hauts et de bas, de rebondissements, une aventure parfois dangereuse, parfois solitaire et très émouvante. Mais même quand il lui était impossible de faire de vélo à cause de la guerre dans son pays, puis lorsqu'elle s'est cachée en Europe, elle n'a jamais perdu de vue sa passion. A la fin de l’année dernière, elle était de retour au Centre Mondial du Cyclisme (CMC) UCI à Aigle, en Suisse, pour s’entraîner, une parenthèse hivernale à l'endroit qu'elle considère comme sa deuxième maison.

« C'est un lieu où je suis heureuse », dit-elle simplement.

Aujourd'hui âgée de 27 ans, Eyeru est arrivée pour la première fois au CMC UCI à l'été 2017, après ses deuxièmes places dans le contre-la-montre et la course en ligne de ses Championnats Nationaux l'année précédente. Après s'être entraînée à Aigle pendant l'été, elle y est revenue à plein temps en 2018 pour rejoindre le programme féminin du CMC UCI. En 2019 et 2020, elle a fait partie de l'Equipe Continentale Femmes UCI du centre, la WCC Team.

Eyeru est retournée en Ethiopie en octobre 2020 pour l'intersaison, et quelques semaines plus tard seulement, le cauchemar a commencé : la guerre civile a éclaté entre sa région – le Tigré – et le reste du pays. Eyeru a perdu des amis et des membres de sa famille. Elle s'est retrouvée dans une ville différente de celle de sa mère et n'avait aucun moyen de communiquer avec elle. Elle a vécu huit mois de peur et de désespoir avant de pouvoir s'en sortir grâce à sa sélection pour les Championnats du Monde Route UCI 2021 de la Flandre, en Belgique.

Ce devait être sa quatrième participation aux Mondiaux UCI sur route... mais elle ne s'y est pas présentée. Au lieu de cela, elle a disparu. Personne ne savait où elle se trouvait. Elle est revenue dans une relative sécurité, mais les choses sont restées difficiles pour la jeune Ethiopienne.

« Je pensais que ce serait plus facile quand je reviendrais en Europe. Mais tout était vraiment difficile. Il était difficile d'obtenir une protection. C'était vraiment difficile, des moments très durs. A ce moment-là, j'étais seule. Je ne parlais à personne, parce que j'avais peur. Et je ne pouvais pas parler à ma famille. »

Peu à peu, les choses ont commencé à s'améliorer. Sa demande d'asile a été acceptée, et elle a obtenu le statut de réfugiée en juillet 2022. Installée en France, elle a bénéficié d'une aide pour trouver un logement et a commencé à apprendre le français.

Eyeru Gebru a enfin pu recommencer à penser au cyclisme, en revenant au sport qui lui avait permis de tenir le coup dans les moments difficiles. Au début, elle faisait du vélo simplement pour se changer les idées.

« C'était comme une thérapie. Je m'entraînais juste pour tout oublier. Quand vous vous asseyez et que vous voyez les nouvelles de chez vous... c'est horrible.

« Le cyclisme m'a sauvé la vie. »

Avec le soutien du Comité National Olympique français et de ses contacts au Centre Mondial du Cyclisme UCI, la jeune cycliste a reçu une bourse du CIO pour les réfugiés afin de l'aider à s'entraîner en vue des Jeux Olympiques de Paris 2024.

L’an passé, elle a rejoint une Equipe Continentale Femme UCI française, le Team Grand Est-Komugi-La Fabrique, où elle a retrouvé l'une de ses anciennes coéquipières de la WCC Team, Fernanda Anabel Yapura Plaza (ARG).

Elle a vécu l’an passé une saison complète de courses internationales, dont le Tour de Suisse, une épreuve de l'UCI Women's WorldTour. Ce fut un retour à la compétition bienvenu et stimulant après deux ans sans épingler de dossard à son maillot.

Elle a certainement remarqué une augmentation du niveau du cyclisme féminin pendant son absence.

« Les filles qui étaient d'habitude lâchées avec moi et avec lesquelles je souffrais sont devenues si rapides. Avant elles roulaient comme moi et maintenant elles peuvent terminer dans le top 10 d'une course de l'UCI Women's WorldTour. Je dois travailler dur. Cela prend du temps, mais je dois faire confiance au processus. »

Et elle est déterminée. Se qualifier pour les Jeux Olympiques de Paris 2024 était son objectif, mais aujourd’hui participer ne suffit plus : « Je veux vraiment réaliser une bonne performance ».

Avant d'entamer une deuxième saison avec son équipe, elle a profité de l'intersaison au Centre Mondial du Cyclisme UCI.

« C'est tellement beau ici, s’enthousiasme-t-elle en pensant au centre et à sa région. C'est comme chez moi. J'ai l'impression d'être avec les miens quand je viens ici. »

Un endroit où elle est heureuse.