Emmenez Kenny Belaey dans une ville qu’il ne connaît pas et vous pouvez être certain qu’il la verra avec un œil bien différent de celui du touriste ordinaire.
Statues, monuments, barrières, tables de pique-nique… voilà ce qu’il verra en premier lieu. Alors que la plupart des vacanciers sortent leur appareil pour photographier un monument, l’athlète belge va plus certainement essayer de négocier les obstacles cités à vélo. Et il ne manque pas une occasion de le faire. Que ce soit en ville ou à la montagne, les vidéos de Kenny Belaey à bicyclette dans les situations les plus improbables font un tabac sur les réseaux sociaux. Son dernier exploit vertigineux a été de rouler sur une slackline de 112 mètres tendue au-dessus d’une gorge à 2’700 mètres d’altitude dans les Alpes françaises. On ne l’appelle pas le Magicien pour rien…
Kenny Belaey est l’un des spécialistes de trial les plus récompensés du monde, avec neuf titres de Champion du Monde UCI dont quatre dans la catégorie Elite.
En parallèle, il monte des spectacles à travers le monde, apparaît à la télévision et a produit sa propre émission TV. Avec sa femme Fien Lammertyn, également cycliste, il organise la manche de Coupe du Monde Trial UCI d’Anvers. Il est membre de la Commission Trial UCI comme représentant des athlètes et a été récemment désigné par ses pairs pour siéger à la Commission des Athlètes UCI.
Comment réussit-il à tout mener de front ? « Je ne sais pas, admet-il. Ça ne s’arrête jamais. Mais je ne ferai pas ça toute ma vie, c’est pour cela que je me donne à 120 %. »
Si Belaey aime le défi et qu’il a le sens du spectacle lorsqu’il affronte de nouveaux obstacles, qu’il filme ses exploits et les diffuse sur les médias sociaux, sa principale motivation est loin d’être narcissique. Il veut partager, avec le plus grand nombre, la beauté d’un sport qui s’est imposé dans sa vie dès l’âge de 6 ans.
Après trois années de vélo, le garçon s’est aussi mis au football et a jonglé avec les deux sports de 9 à 12 ans. Bien que sélectionné en équipe régionale, il a vite réalisé qu’il n’était pas fait pour les sports collectifs.
« Quand tu te fixes un objectif, passes la balle et que l’autre se rate… Je n’arrivais pas à accepter ça. Ce n’était pas mon truc. Au trial, tu ne comptes que sur toi-même. C’est juste toi et les obstacles. Tu dois réfléchir et être concentré.
« C’est une question de créativité, de force mentale, d’endurance. J’aime être seul, rien que moi et mon vélo. »
Bien que la campagne et les montagnes constituent ses terrains de jeu privilégiés, il a également investi les zones urbaines afin de promouvoir sa discipline.
« Si je réalise une vidéo sur un rocher technique à la montagne, je totaliserai 10'000 vues (sur les médias sociaux). Si j’utilise une statue ou une table de pique-nique, il y en aura 200’000 ou 300'000, parce que les internautes savent ce que c’est que des tables de pique-nique, mais que personne ne les franchit à vélo. »
La situation est la même pour les compétitions de trial, qui se sont déplacées des espaces naturels au centre des villes.
« Mon cœur me porte vers la forêt et les montagnes, mais nous avons amené leurs obstacles dans les centres-villes. Fondamentalement, nous avons amené la compétition aux gens.
« A l’époque où j’ai débuté, le sport était peu développé, mais maintenant il y a des compétitions de plus haut niveau et plus de respect pour la discipline et ce qu’elle a à offrir. »
Toutes les vidéos de Belaey ne se limitent pas au trial – il a roulé sur une slackline avec un mountain bike –, mais elles restent toutes dans l’esprit du trial et servent à faire davantage de publicité pour la discipline. Il n’est jamais à court d’idées pour mettre le trial en avant, que ce soit sur un vélo de trial urbain, de compétition ou un mountain bike.
« Chaque jour je me réveille avec de nouvelles idées. Je rends ma femme folle ! »
Certains de ses exploits sont carrément sidérants. Est-ce qu’il lui arrive d’avoir peur et de changer d’avis ?
« J’en étais proche avec la slackline. Lorsque je suis allé là-bas en haut, j’osais à peine regarder en bas et je me suis vraiment dit « impossible ». J’ai échoué à la première tentative, mais… je ne sais pas. Je vois beaucoup de gens qui restent dans leur zone de confort, mais moi j’aime en sortir et aller toujours plus loin.
« Un trialiste a besoin de persévérance, de détermination et de passion pour parvenir à quelque-chose. Vous devez être doté d’un talent un peu fou et surnaturel. »
Cela étant dit, il insiste sur le fait que le trial est moins dangereux que d’autres disciplines du cyclisme : « Il n’y a pas de circulation, on ne va jamais vite, il n’y a pas d’autres coureurs, juste toi et ton vélo. »
En près de 20 ans de compétition internationale, la plus grave blessure de cet athlète de 32 ans est une fracture du scaphoïde en 2012.
C’est après cette blessure qu’il a décidé d’abandonner la compétition. Il s’agissait d’une retraite précoce. Son amour pour le vélo l’a poussé à continuer à rouler et à s’entraîner, et à rester performant. Il a conservé un excellent niveau et fait périodiquement son retour à la compétition : chaque année depuis lors, il est monté sur le podium des Championnats du Monde UCI.
« J’aime la compétition. J’ai besoin de cette motivation. Si j’arrête de m’entraîner, je suis malheureux. »