Le vent du changement a soufflé sur le peloton et les podiums du cyclisme sur route en 2019

Un vent nouveau a soufflé sur le peloton en 2019, favorisant l’apparition de nouveaux visages sur les podiums les plus prestigieux du cyclisme sur route. Tout a commencé dès le printemps, avec les succès d’Alberto Bettiol (EF Education First) sur le Tour des Flandres (sa première victoire professionnelle, sur un Monument, à 25 ans) et les débuts de Mathieu Van der Poel au niveau UCI WorldTour (vainqueur d’A travers les Flandres et de l’Amstel Gold Race, et 4e du Tour des Flandres).

Du côté féminin, la jeune Lorena Wiebes (Parkhotel Valkenburg), 20 ans seulement, a également bouleversé la hiérarchie au printemps avec ses deuxièmes places aux Driedaagse Brugge – de Panne et sur Gent-Wevelgem in Flanders Fields, préludes à ses trois victoires d’étape au Tour of Chongming Island UCI Women’s WorldTour, épreuve dont elle a aussi remporté le classement général, ses deux victoires d’étape au Ladies Tour of Norway et son succès dans la course en ligne des Jeux Européens.

Le vent du changement a également soufflé durant l’automne, lorsque le déluge s’est abattu sur les Championnats du Monde Route UCI et que de jeunes coureurs comme l’Américaine Chloé Dygert et le Danois Mads Pedersen ont occupé le devant de la scène.

A tout juste 22 ans, Dygert a remporté une victoire plus que convaincante dans le contre-la-montre des Femmes Elite, à Harrogate, dans le Yorkshire (Grande-Bretagne). La jeune athlète a totalement surclassé ses rivales, dont la Championne du Monde UCI sortante, qui s’étaient imposée à ce niveau à deux reprises Annemiek van Vleuten (médaillée de bronze 2019) et la Championne du Monde UCI 2018 de la course en ligne Anna van der Breggen (médaillée d’argent). On ajoutera qu’en gagnant, Dygert a battu deux records : celui de la plus jeune coureuse à remporter le contre-la-montre individuel de Mondiaux UCI et celui de la victoire avec la plus grande marge de l’histoire (1 minute 32 s).

De même, à 23 ans et 9 mois, Pedersen est devenu le plus jeune Champion du Monde UCI de la course en ligne Hommes Elite du XXIe siècle, au bout d’une des éditions les plus éprouvantes, disputée dans des conditions météorologiques dantesques (). Le dernier coureur à avoir été encore plus précoce est Oscar Freire, âgé de 23 ans et 7 mois au moment d’imposer son talent à la face du monde en 1999, à Vérone(Italie). L’Espagnol avait ensuite mené une longue et brillante carrière, avec trois titres de Champion du Monde UCI et une belle révérence : à Valkenburg, aux Championnats du Monde Route UCI 2012, il finissait dans le top 10 pour la huitième fois, à l’âge de 36 ans.

L’avenir de Mads Pedersen, qui s’était déjà distingué en finissant 2e du Tour des Flandres en 2018, s’annonce donc radieux sous ses nouvelles couleurs arc-en-ciel.

Tornade américaine

L’homologue féminine de Pedersen, la Néerlandaise Annemiek van Vleuten, est l’un des meilleures coureuses du peloton depuis des années, mais sa victoire sur les routes britanniques n’en était pas moins historique : la double Championne du Monde UCI du contre-la-montre (en 2017 et 2018), a signé un numéro d’anthologie (105 km en solitaire !) pour briguer son premier titre mondial sur la course en ligne. Elle rejoint la Française Jeannie Longo, la Néerlandaise Leontien van Moorsel et l’Allemande Judith Arndt, les seules avant elle à avoir décroché l’arc-en-ciel dans les deux épreuves individuelles sur route.

Van Vleuten a en revanche dû abandonner son titre mondial du contre-la-montre à une tornade sortie des vélodromes pour tourmenter les routières accomplies. A 22 ans, Chloé Dygert se présentait dans le Yorkshire avec cinq titres mondiaux décrochés sur les pistes de Londres (en 2016), Hong Kong (2017) et Apeldoorn (2018). Elle a survolé le contre-la-montre individuel des Mondiaux Route UCI 2019, devant deux Néerlandaises, Anna van der Breggen et Annemiek van Vleuten. Et le podium lui a échappé de peu dans la course en ligne (4e). La fusée Dygert est prête à décoller en 2020. Le contre-la-montre individuel a également propulsé sur le devant de la scène masculine un tout jeune et exceptionnel talent.

A 29 ans, l’Australien Rohan Dennis a remporté son deuxième titre mondial UCI d’affilée. Son premier rival était âgé de 10 ans de mois : le Belge Remco Evenepoel s'est offert une première médaille (d’argent) chez les grands, un an après avoir remporté la course en ligne et le chrono Juniors aux Championnats du Monde Route UCI d’Innsbruck (Autriche). De bon augure pour l’Américain Quinn Simmons, vainqueur de la course en ligne des Juniors dans le Yorkshire. L’an prochain, à 18 ans, il rejoindra l’UCI WorldTour au sein de l’UCI WorldTeam Trek-Segafredo, sans passer par les rangs de la catégorie Moins de 23 ans. Comme Evenepoel un an plus tôt.

Si l’on ajoute à cela le titre de Megan Jastrab dans la course en ligne des Femmes Juniors, on comprend que les athlètes nord-américains incarnent parfaitement le changement en marche tout au long de la saison 2019.

S’agissant de nouveauté, il faut aussi mentionner l’introduction lors des Championnats du Monde Route UCI 2019 du contre-la-montre par équipes nationales de trois hommes et trois femmes, disputé sous la forme d’un relais. Les Pays-Bas sont devenus les premiers Champions du Monde UCI de ce nouveau format innovant, devant l’Allemagne et la Grande-Bretagne.

Du nouveau sur les Grands Tours aussi

Il apparaît bien imprudent de fixer des limites à de tels talents. Pour certains, Remco Evenepoel n’était pas assez mûr pour monter cette année sur le podium face à des adversaires de la catégorie Elite. Pourtant, sur la Clasica San Sebastian, en août, le « gamin » de la formation Deceuninck-Quick Step est devenu à 19 ans et 8 mois le plus jeune vainqueur d’une course UCI WorldTour. Le jeune Belge possède-t-il l’étoffe pour ramener un peu de tradition dans un cyclisme en pleine évolution ? Son pays attend en effet un vainqueur de Grand Tour belge depuis la victoire de Johan De Muynck dans le Giro 1978.

Même les Grands Tours affichent des vainqueurs tout frais : en 2019, le Giro d’Italia, le Tour de France et la Vuelta a España ont chacun consacré un nouveau venu. A Vérone, Richard Carapaz (Movistar Team) est devenu le premier Equatorien à s’imposer sur trois semaines. Primož Roglič (Team Jumbo Visma) a fait de même pour la Slovénie à Madrid. Et à Paris, Egan Bernal (Team Ineos) a concrétisé le rêve jaune des Colombiens. A 22 ans et 6 mois, il est le troisième plus jeune vainqueur de l’histoire de la Grande Boucle, et le plus jeune depuis l’apparition du maillot jaune en 1919.

A tout juste 20 ans, Lorena Wiebes a également démontré qu’il fallait compter sur elle pour les courses par étapes avec ses victoires dans le Tour of Chongming Island UCI Women’s WorldTour et deux étapes du Ladies Tour of Norway dont elle a été sacrée Meilleure Jeune Coureuse. D’autres athlètes comme les Italiennes de 21 ans Marta Cavalli (deuxième Meilleure Jeune Coureuse de l’UCI Women’s WorldTour) ou Elisa Balsamo (vainqueure d’épreuves UCI de classe 1.1, le Trofee Maarten Wynants et Dwars door de Westhoek) sont aussi en train de se faire une place de choix au sein du peloton Elite.

Et il ne fait aucun doute que les belles performances réalisées en 2019 par les nouveaux talents évoqués ne sont que le début de belles histoires, qu’on se réjouit de suivre en 2020.