Parlez du vélo à Oman et la majorité des passionnés du cyclisme vont immédiatement penser au Tour d’Oman, une course par étapes figurant au calendrier de l’UCI Asia Tour, remportée en 2013 et 2014 par nul autre que Chris Froome.
Cependant dans ce sultanat du Moyen-Orient, le cyclisme revêt une dimension plus profonde que cette course internationale de haut niveau destinée aux professionnels.
Avec la croissance de l’économie basée sur le pétrole, l’urbanisation s’intensifie et la demande en voitures augmente. Il en résulte que les activistes locaux favorables au cyclisme appellent à la préservation des sentiers de mountain bike.
La beauté exceptionnelle des paysages bucoliques d’Oman serait en elle-même une raison suffisante de faire campagne en faveur de la protection de l’environnement. Toutefois, derrière le mouvement pour développer et promouvoir la pratique du mountain bike en pays arabe se dissimule un mobile qui tient davantage à l’économie. Oman s’efforce de s’établir comme destination touristique, dans le but de diversifier son économie. Selon Andrea Wenke, du Département tourisme de l’Université Sultan Qaboos, le mountain bike peut jouer un rôle déterminant pour attirer les touristes dans le pays.
Madame Wenke défend la cause du cyclisme aussi a t-elle un intérêt particulier à promouvoir le vélo. Toutefois, en tant que chercheuse travaillant au sein du premier institut universitaire d’Oman, son sage jugement est appuyé par des chiffres. Le tourisme lié au mountain bike possède un énorme potentiel.
IMBA, l’Association internationale de mountain bike, possède d’abondantes ressources disponibles à ceux qui souhaitent approfondir davantage les effets de la pratique du mountain bike sur l’économie locale – en particulier en zones rurales. Toutefois, quelques chiffres suffisent à donner une idée de l’ampleur du mouvement. Dans l’une des sphères traditionnelles de ce sport, la région des Rocheuses aux États-Unis (8 états réunissant une population globale de quelque 23 millions d’habitants), le cyclisme soutient plus de 60’000 emplois, générant annuellement un chiffre d’affaires de 4,1 milliards de dollars dans les secteurs de la vente au détail et des services. Avoir de bons sentiers de mountain bike est extrêmement rentable pour les entreprises locales. C’est aussi très important pour les métiers associés au tourisme : dans une étude qui vient d’être publiée traitant de l’emploi dans le secteur européen du cyclisme, la Fédération européenne des cyclistes a estimé que dans l’Union européenne, 524’000 personnes ont des occupations liées au cyclotourisme.
Mme Wenke, qui est actuellement à la recherche de partenaires afin de réaliser une étude trans-sectorielle de l’impact du cyclotourisme et des évènements sur l’économie locale, a une vision stratégique pour le secteur touristique du pays.
« Oman finance des évènements cyclistes de premier plan avec des deniers publics, pour améliorer l’image du pays en tant que destination touristique. C’est déjà bien. Mais la mise en valeur de la destination n’est qu’un début. La poursuite du développement est essentielle pour générer une ‘valeur nationale’ résultant de l’augmentation du volume des voyages vers le pays. »
Le mountain bike peut être un élément clé dans ce processus, dans la mesure où la planification et la fourniture d’infrastructures et d’informations sont transmises à un niveau adéquat.
L’affaire ne peut pas être menée à bien sans une collaboration. Les organisateurs d’évènements devraient être intégrés aux processus de planification. Oman semble être sur la bonne voie.
En effet, en parallèle au Tour d’Oman, le sultanat accueille la Trans Hajar, la première course de mountain bike à étapes du Moyen-Orient. La Trans Hajar est maintenant par gérée par Oman Sail, l’organe directeur national de l’important sport de la voile, qui, de fait, opère également en tant qu’agence d’organisation d’évènements sportifs.
« Des opportunités inexploitées existent pour les populations rurales. La coopération avec les communautés locales qui accueillent l’évènement a été insuffisante dans le passé, et aucune recette ou emploi n’a été généré » fait remarquer Mme Wenke.
Oman Sail, qui est une entreprise d’Etat, peut garantir que la Trans Hajar contribue au développement des régions montagneuses d’Oman. « Que faut-il pour stimuler le tourisme pour de bon ? Des infrastructures, des entreprises dédiées au cyclisme et à la randonnée, des guides qualifiés de mountain bike et de randonnée, ainsi que des services et installations pour les cyclotouristes », conclut Mme Wenke.
Bien qu’aucune collaboration à long terme n’ait encore débuté avec le Ministère du tourisme, Oman Sail a déjà annoncé que les sentiers utilisés pour la course seront indiqués et mis à la disposition des passionnés de mountain bike pendant toute l’année.
De telles actions contribuent à positionner le sultanat sur la carte d’un tourisme de mountain bike rémunérateur et propice au développement, tout en offrant à la population locale et aux expatriés des opportunités de profiter d’activités physiques.
Et qu’en est-il des autres formes de cyclisme dans le pays ? Marc, est un expatrié occidental qui vit à Oman depuis suffisamment longtemps pour avoir une idée sur le sujet : « Des circuits dédiés, sans voiture, où les cyclistes pourraient faire du vélo sans craindre d’être percutés par les voitures seraient vraiment nécessaires. Comme par exemple les pistes cyclables Nadd Al Sheba et Al Qudra de Dubaï ».
Leurs voisins, les Émirats arabes unis, ont établi la référence. Le Dubaï Autodrome et le circuit de Formule 1 d’Abou Dabi sont ouverts aux cyclistes un soir par semaine et jouissent d’une immense popularité. Oman vient de commencer à ouvrir la piste automobile nationale aux familles les vendredis matins pour tenter de reproduire le succès obtenu par les É.A.U.
Et Marc de conclure : « La grande majorité des membres actifs de la communauté cycliste omanaise sont des expatriés occidentaux. Toutefois, une bonne infrastructure peut encourager davantage de personnes à s’adonner au cyclisme récréatif. Les automobilistes locaux sont généralement distraits et indisciplinés. Des circuits dédiés, sans voiture, augmenterait la perception de sécurité et finalement, l’ampleur à laquelle le cyclisme est pratiqué ».