Pogačar s'attaque aux Classiques

Tadej Pogačar (UAE Team Emirates) ne rêvait pas de remporter le Tour de France. Il a débuté le cyclisme, à l'âge de 9 ans, suivant les traces de son grand frère. Ses ambitions les plus folles à l'époque et jusqu'à très récemment étaient simplement de participer à un Grand Tour, et tout particulièrement au Tour de France, dont la magie, avec ses coureurs fendant la foule sur les routes de montagne, l’avait fasciné.

« On regardait la course à la télé. C'était incroyable, se remémorait le prodige Slovène au moment où son talent commençait à s'imposer au plus haut niveau. On avait nos idoles et on se disputait pour savoir qui était le meilleur. Je soutenais toujours les frères Schleck, mais aussi [Alberto] Contador et les autres grands champions. »

Comme Contador, Pogačar a tout d’abord enflammé les routes de La Vuelta Ciclista a España (trois victoires d'étape et 3e en 2019) et il a remporté son premier Grand Tour sur les routes françaises. Fränk Schleck ne s'est jamais imposé sur une course de trois semaines (son meilleur résultat est 3e du Tour de France remporté par Cadel Evans en 2011), mais il était l’un des meilleurs coureurs de sa génération sur les Classiques vallonnées.

Pogačar préfère s'inspirer d'Andy Schleck, qui a brillé sur les deux terrains, en remportant le Tour de France (en 2010) et un Monument, lorsqu'il est envolé vers la victoire en solitaire sur Liège-Bastogne-Liège (2009). « Je veux remporter beaucoup de courses », assure le vainqueur slovène du Tour. Et il est prêt à assouvir ses envies de succès sur toutes les épreuves qui se présenteront : « J'aime les courses d'un jour, mais aussi les courses par étapes. »

La deuxième partie de sa saison 2020, après avoir remporté le Tour dès son premier essai (un exploit inédit depuis Laurent Fignon en 1983), le verra se frotter aux Classiques. Pogačar se rendra en Belgique où il disputera la Flèche Wallonne (30 septembre), Liège-Bastogne-Liège (4 octobre) et le Tour des Flandres (18 octobre). S’il ne fait pas partie des principaux favoris, il est cependant difficile de savoir où se situent les limites du talent du prodige slovène.

Le Tour de France 2020 a été l'occasion parfaite pour lui de montrer les qualités qui font de lui un coureur de Grand Tour d’exception. Pogačar est un excellent grimpeur qui n’hésite pas à attaquer. Et il a clairement démontré qu’il était redoutable contre la montre. Il sait toujours garder son calme pour limiter ses pertes éventuelles, par exemple dans les bordures de la 7e étape ou sur les pentes du Col de la Loze (17e étape), et tirer le meilleur parti des occasions qui se présentent pour prendre du temps à ses rivaux. Il a d'excellentes qualités de récupération, et son explosivité lui permet de lâcher ses adversaires en montée ou de les dominer au sprint, comme lors de la 9e étape vers Laruns.

Toutes ces qualités peuvent permettre à Pogačar de briller sur les courses d'un jour. Il a déjà montré des signes encourageants sur ce terrain, même si ses performances dans les Classiques ne suivent pas encore ses exploits sur les courses par étapes.

Dès le début de sa première saison chez les professionnels (2019), il a disputé les Strade Bianche dont il a pris la 30e place. Un mois plus tard, il était 6e du Gran Premio Miguel Indurain, avant de se lancer dans sa première campagne de Classiques. Bilan :  abandon sur l'Amstel Gold Race, 53e de la Flèche Wallonne et 18e de Liège-Bastogne-Liège, dans le même groupe que Julian Alaphilippe et l'ancien Champion du Monde Route UCI Michal Kwiatkowski, après 256 kilomètres difficiles, à 20 ans seulement.

« Je suis content de cette performance, expliquait-il à la fin de la saison 2019. C'était une de mes courses les plus difficiles de l'année mais ce n'est pas la distance qui me fait peur. Il pleuvait toute la journée, c'était une longue course, mais je me sentais vraiment bien. »

Enfant, Tadej était déjà attiré par l'intensité particulière des courses d'un jour : « La foule, l'adrénaline de la course... Les courses du dimanche, c'était de petites courses en Slovénie, mais c'était excitant, et l'adrénaline était à fond. » Au fil de son évolution sportive, Pogačar a déjà goûté aux pavés du Tour des Flandres Moins de 23 ans, en 2018. Le jeune Slovène avait seulement 19 ans, il affrontait des coureurs plus expérimentés, mais il avait rallié Audenarde à l'avant et pris la 15e place, dans le même groupe que le Suisse Marc Hirschi.

Tadej Pogačar n'a pas eu beaucoup d'occasions de montrer ses talents sur les courses d'un jour en 2020, mais il est retourné sur les Strade Bianche (13e) lorsque les courses ont repris cet été. Une semaine plus tard, il finissait 12e au bout des 300 km de Milano-Sanremo. Démontrant une fois de plus que les longues distances ne lui posent pas de problème.

Avant que Pogačar ne fasse de la Slovénie le 15e pays avec un vainqueur du Tour de France, Primož Roglič (Team Jumbo-Visma) avait signé sur La Vuelta Ciclista a España 2019 le premier succès slovène sur un Grand Tour. Fin août, Luka Mezgec (Mitchelton-Scott) a fini 2e de la Bretagne Classic – Ouest-France. Un coureur comme Matej Mohoric (Bahrain-McLaren) a montré ses qualités sur les courses d'un jour avec sa victoire aux Championnats du Monde Route UCI 2013 chez les Moins de 23 Ans (à 18 ans) et deux tops 10 à Sanremo (5e en 2019, 10e en 2020). Pogačar se joint désormais à eux dans la course aux Classiques.