La Madison est une épreuve d'endurance très intéressante, disputée par équipes de deux coureurs. Simple en apparence, elle présente une complexité subtile. Quelques explications pour comprendre ses règles, le calcul des points et quelles sont les caractéristiques d’une paire qui gagne.
Né aux Etats-Unis à la fin du 19e siècle, ce format de course tient son nom du Madison Square Garden, à New York, où une telle épreuve s'est disputée pour la première fois. En français, on l’appelle d’ailleurs aussi l’« Américaine ».
Les équipes sont composées de deux coureurs, dont un seul est actif sur le vélodrome tandis que l'autre « récupère » en roulant à une allure modérée en haut de la piste. Ils peuvent se passer le relais à tout moment et n’importe où, par un contact au niveau de la main ou du cuissard. Le coureur qui a terminé son relais en profite généralement pour « lancer » son partenaire main dans la main.
Les coureurs peuvent gagner des points lors de sprints intermédiaires et, comme dans la course aux points, en prenant un tour au reste du peloton. C’est le total de points à l'arrivée qui détermine le vainqueur.
La Madison a été au programme olympique pour les hommes à trois occasions : en 2000 (victoire de l'Argentine), en 2004 et en 2008 (victoire australienne dans les deux cas). Les règles ont évolué au fil des ans jusqu'à ce que le format actuel soit adopté à l'aube de l’édition 2016-2017 de la Coupe du Monde Piste UCI. Cette mise à jour a été accompagnée par l'introduction d'une épreuve de Madison féminine lors des Championnats du Monde UCI 2017.
La course masculine se déroule sur une distance de 50 km (200 tours sur une piste de 250 m), tandis que les femmes s'affrontent sur 30 km (120 tours). Un sprint intermédiaire est disputé tous les 10 tours. Cinq points sont attribués à l'équipe dont le coureur passe en tête, 3 points à la deuxième, puis 2 à la troisième et un à la quatrième. Les points sont doublés lors du sprint final, ce qui peut donner lieu à une fin de course intense. Prendre un tour sur le peloton rapporte 20 points, un total à même de faire la différence. Inversement, une équipe qui perd un tour perd 20 points.
L’un des aspects les plus prenants de la Madison réside dans les combinaisons tactiques de chaque équipe. Qui va tenter de prendre un tour au peloton ? Un duo a-t-il les moyens de disputer tous les sprints ou la plupart d’entre eux ? Ou les coureurs devront-ils doser leurs efforts et choisir leur(s) moment(s) pour aller chercher la victoire ?
La Madison exige une compréhension totale entre les deux coureurs, y compris pour lire le langage corporel de son partenaire, et une immense confiance.
Tout cela est d’une importance capitale lorsque le peloton atteint des vitesses largement supérieures à 50 km/h et que les membres des équipes lancent leur partenaire dans la mêlée lors des moments clés de la course, lorsqu’il s’agit de remporter un sprint ou de prendre un tour au reste de leurs adversaires.
Les meilleurs duos associent souvent un coureur très expérimenté, capable de prendre un tour à ses adversaires, à un sprinteur explosif. C'est le profil de la plupart des paires qui se sont imposées lors des Championnats du Monde UCI, où l’on retrouve la Madison masculine depuis1995.
La paire constituée des Britanniques Bradley Wiggins et Mark Cavendish a décroché le maillot arc-en-ciel de la Madison à deux reprises : en 2008 et 2016. L'endurance de Wiggins, vainqueur du Tour de France 2012 après 3'500 km d'effort sur trois semaines, faisait merveille avec l'explosivité de Cavendish, le sprinteur contemporain au plus beau palmarès avec ses 48 succès d'étape sur les Grands Tours et ses victoires au classement par points de chacun d'entre eux. Le sprinteur de l'île de Man a aussi obtenu le titre mondial de la Madison lors des Mondiaux UCI 2005 (à Los Angeles), associé à Rob Hayles, ancien Champion de Grande-Bretagne sur la route.
L'Espagnol Joan Llaneras est le seul autre coureur à avoir été sacré Champion du Monde UCI de la Madison à trois reprises (avec Miquel Alzamora en 1997, puis avec Isaac Gálvez en 1999 et 2006).
Les Danois Michael Mørkøv (sprinteur) et Lasse Norman Hansen (spécialiste du contre-la-montre sur la route) sont les Champions du Monde UCI en titre depuis leur sacre à Berlin en 2020, après avoir pris un tour au reste des participants et terminé la course à la vitesse moyenne de 58,754 km/h. Le duo a également remporté la Madison lors de la manche inaugurale de la Coupe du Monde Piste UCI Tissot 2019-2020, à Minsk. Mørkøv s'était également offert un premier titre mondial en 2009, avec son partenaire de longue date Alex Rasmussen, un autre spécialiste du contre-la-montre.
Parmi les multiples Champions du Monde UCI de la discipline, on retrouve les Allemands Roger Kluge et Theo Reinhardt, vainqueurs coup sur coup à Apeldoorn, aux Pays-Bas, (2018) puis à Pruszków, en Pologne (2019). A 34 ans, Kluge exerce également ses talents sur la route en tant que sprinteur ou poisson-pilote (il est aujourd'hui membre de l'UCI WorldTeam Lotto Soudal), tandis que son jeune partenaire a plutôt des qualités d'endurance. Ensemble, ils ont également brillé sur plusieurs Six Jours et se sont imposés lors de la 3e manche de la Coupe du Monde Piste UCI Tissot 2019-2020, à Hong Kong.
Les Australiens Leigh Howard et Cameron Meyer, eux aussi doubles Champions du Monde UCI (en 2010 à Ballerup et 2011 à Apeldoorn), forment une association similaire. Meyer a par ailleurs remporté la 5e manche la Coupe du Monde Piste UCI 2019-2020, à Brisbane, avec son équipier de 24 ans Sam Welsford. Ce dernier a lui aussi marqué l'histoire de la discipline, avec Howard : à Glasgow, en novembre, ils ont réalisé une moyenne de 59,921 km/h lors de la deuxième manche de la Coupe du Monde Piste UCI 2019-2020, un record dans l'ère moderne de la Madison.
Si chez les femmes la spécialité a rejoint bien plus récemment le programme des Championnats du Monde UCI, elle a néanmoins permis d'observer des tendances comparables à celles observées chez leurs homologues masculins. Dès 2017, l'équipe belge sacrée Championne d'Europe un an plus tôt en a offert une illustration parfaite avec la polyvalente routière et pistarde Lotte Kopecky, experte du contre-la-montre, lançant la puissante sprinteuse Jolien D’Hoore vers le premier titre mondial féminin de Madison.
Le duo le plus couronné dans la discipline à ce jour est composé des Néerlandaises Kirsten Wild (toujours aussi puissante et explosive à 37 ans) et sa jeune partenaire polyvalente Amy Pieters. Ensemble, elles se sont imposées lors des deux dernières éditions des Championnats du Monde Piste UCI Tissot. Elles ont obtenu leur maillot arc-en-ciel lors des Mondiaux UCI 2020 de Berlin à la vitesse moyenne de 50,908 km/h.
Pieters et Wild ont remporté la première manche de la Coupe du Monde UCI Tissot 2019-2020, à Minsk, avant de s'effacer devant la domination australienne. Les coureuses des antipodes ont remporté trois courses. Georgia Baker (25 ans, médaillée d'argent aux Mondiaux UCI 2019 avec Amy Cure) était présente à chaque fois, associée à Annette Edmondson à deux reprises et à Alexandra Manly pour son autre succès. La prochaine association australienne méritera d'être suivie avec attention !
Et la concurrence s’annonce très relevée pour les prochaines compétitions. Lors des prochains Jeux Olympiques, à Tokyo, la Madison – féminine et masculine – verra s’affronter des équipes de 16 pays.