Gros plan sur le Paraguay

Aucun ni aucune cycliste du Paraguay n’est parvenu à ce jour à terminer la course sur route aux Championnats du Monde Route UCI.

Agua Marina Espinola espère changer cela. Elle s’entraîne actuellement au Centre Mondial du Cyclisme (CMC) UCI d’Aigle, en Suisse. Elle est complètement concentrée sur sa préparation pour les Championnats du Monde de Bergen (Norvège) en septembre.

Il y a sept ans, elle ne savait même pas que le cyclisme était un sport de compétition.

« J’ai vu des gens faire du cyclisme et ça m’a intéressée. Je leur ai demandé comment je pouvais commencer. Ils m’ont prêté un vélo et deux mois plus tard, je participais à ma première course. »

La jeune fille alors âgée de 14 ans est l’une des deux seules représentantes du sexe opposé dans un peloton autrement complètement masculin. Elle finit cette course de 70 kilomètres à l’avant-dernière place. « C’était très long. J’ai beaucoup souffert, mais en même temps ça m’a plu. »

Dès lors, il ne faut pas longtemps à la jeune athlète pour comprendre qu’elle vient de découvrir son sport de prédilection. Malgré cela, jamais elle n’aurait rêvé participer un jour aux Championnats du Monde Route UCI.

« Je suis très impatiente et un peu inquiète », explique la jeune femme de 21 ans, qui est une véritable pionnière pour le cyclisme féminin dans son pays. Elle est en effet la première athlète paraguayenne à s’entraîner au CMC UCI et espère devenir la première sportive de son pays à terminer une course des Championnats du Monde Route UCI. Elle pourrait également devenir la première cycliste de son pays à participer aux Jeux Olympiques.

« Je pense que tout est possible », poursuit la jeune femme qui a fait tatouer “Born to ride” sur son poignet après avoir bouclé le Tour de San Luis féminin 2015 en Argentine. « Tout le monde pensait que j’allais abandonner, mais je suis allée au bout. »

Pas facile pour autant de tracer son chemin dans un pays où les femmes cyclistes demeurent très rares:

Il est très difficile de s’entraîner à un bon niveau. Ou alors, il faut participer à des courses masculines, mais les hommes voient rarement cela d’un bon œil.

Elle continue: « Sinon, il y a la solution d’aller en Argentine ou au Brésil pour participer à des courses, mais ça revient vite cher. »

Elle a été invitée à s’entraîner à Aigle après avoir été repérée durant un stage d’entraînement au centre satellite du CMC de Mar del Plata, en Argentine. Elle y est depuis le mois de mars et emmagasine de l’expérience jour après jour en s’entraînant sous l’œil attentif des coaches professionnels du centre. En outre, elle participe régulièrement à des courses en Europe.

« Je suis très heureuse d’être ici. Cela me permet d’améliorer mon niveau et d’apprendre à courir : la technique, la tactique, les descentes, les virages… Je progresse. Je m’en rends compte. Mon pays me manque mais en même temps, c’est moi qui ai choisi d’être ici. Chaque année, le niveau s’améliore au Paraguay et je veux montrer aux gens de mon pays qu’il est possible d’être Paraguayenne et de réussir. »

Sa progression est suivie de très près par la Federación Paraguaya de Ciclismo, qui travaille d’arrache-pied pour développer le cyclisme non seulement au plus haut niveau, mais également au sein de toute la population. L’accent est mis en particulier sur le développement des jeunes cyclistes, avec la création de centres de formation au cyclisme, de clubs, grâce aussi à la collaboration croissante avec les écoles.

Parmi les priorités de la Fédération : un enrichissement du calendrier des courses dans toutes les disciplines et catégories d’âge, ainsi qu’une augmentation des stages de formation des entraîneurs et des commissaires de course.

« Nous axons notre travail sur la formation et la mise à niveau du personnel des diverses professions du cyclisme. Sans cela, il sera impossible de développer ce sport à l’échelle nationale », explique le Président de la Federación Paraguaya de Ciclismo, Kashi Cesar Garrido Cáceres.

« Le cyclisme est en train de connaître un engouement important au Paraguay, surtout chez les jeunes et dans la discipline du mountain bike. Nous pouvons mesurer la croissance du cyclisme en observant l’augmentation du nombre de licenciés. Fin 2016, il y avait 643 coureurs licenciés. En 2017, nous avons déjà délivré 1 015 licences. »

Il espère que l’apparition d’Agua Marina Espinola aux Championnats du Monde Route UCI 2017 va servir de catalyseur pour les autres athlètes paraguayens. « Sa progression nous donne l’espoir d’obtenir un résultat au niveau international pour avoir ainsi une place plus importante dans les futurs événements. »