Le Tour de Pologne fait partie de l’UCI WorldTour depuis la création de ce dernier en 2011 – et il faisait également partie de son prédécesseur, l’UCI ProTour –, mais cette année, pour la première fois, un UCI WorldTeam du pays hôte y participe : le CCC Team.
Le groupe CCC sponsorise une équipe cycliste depuis l’an 2000, mais toujours au niveau continental professionnel jusqu’au rapprochement de son propriétaire, Dariusz Milek, avec le BMC Racing Team alors à la recherche d’un repreneur. Le partenariat a été annoncé pendant le Tour de France 2018 par Jim Ochowicz, le pionnier qui avait emmené la formation 7-Eleven en Europe dans les années 80 et donné à l’Amérique du Nord son premier porteur du maillot jaune, le Canadien Alex Stieda en 1986. “Och” est depuis quatre décennies l’une des personnalités les plus influentes du sport cycliste mondial. Mais il n’a pas oublié ses racines. Né à Milwaukee, dans le Wisconsin, en 1951, il se souvient : « Mon grand-père a émigré de Pologne vers les Etats-Unis. »
Plusieurs autres grands noms du cyclisme américain ont une consonance polonaise. Eddie Borysewicz – connu sous le diminutif d’Eddie B – est probablement le plus célèbre d’entre eux. Borysewicz, né au nord-est de la Pologne dans une contrée qui fait partie de l’actuel Belarus, a été le formateur de Greg LeMond, entre autres. La Pologne est parfois perçue comme un nouveau territoire pour le sport cycliste compte tenu de l’émergence de courses, d’équipes et de coureurs. En vérité, le Tour de Pologne en est à sa 76e édition (à titre de comparaison, la Vuelta a España connaîtra bientôt sa 74e édition). Sa création remonte à 1928. L’épreuve ne s’est cependant ouverte aux professionnels qu’en 1993 et a décollé internationalement l’année suivante avec la victoire de la superstar italienne Maurizio Fondriest, ancien Champion du Monde UCI sur route.
L’histoire s’est accélérée en 2014 à Ponferrada (Espagne) quand Michal Kwiatkowski est devenu le premier Polonais Champion du Monde Elite UCI de la course en ligne. Mais le maillot arc-en-ciel n’avait rien de nouveau dans un pays qui avait célébré quatre Champions du Monde Amateurs UCI dans les années 70 et 80 : Ryszard Szurkowski, Janusz Kowalski, Lech Piasecki et Joachim Halupczok, ainsi que cinq autres médaillés mondiaux quand, dans le même temps, le grand voisin soviétique ne ramenait qu’un seul titre. L’actuel Directeur du Tour de Pologne, Czeslaw Lang, lui-même vainqueur de l’épreuve en 1980 et qui continue d’être présenté comme la figure de proue du cyclisme polonais, était le médaillé d’argent de la course sur route aux Jeux Olympiques de Moscou 1980, battu seulement par l’intouchable Sergeï Soukhoroutchenkov qui était considéré à l’époque comme le Bernard Hinault de l’autre côté du rideau de fer.
Dariusz Milek, 51 ans, est nostalgique de la précédente époque dorée du cyclisme polonais. Il était lui-même un cycliste prometteur jusqu’à ce qu’une blessure ne fasse dérailler sa carrière. Maintenant fabricant fortuné de chaussures et de sacs, à la tête d’un important réseau européen de distribution, il entend donner une chance aux jeunes cyclistes polonais d’atteindre le plus haut niveau, à la suite de la génération de Michal Kwiatkowski et Rafal Majka. Dès qu’il a investi dans l’ex-BMC Racing Team, construite autour du Champion Olympique en titre Greg Van Avermaet, il a transformé son ancienne Equipe Continentale Professionnelle UCI en un centre de formation au niveau continental dans le but de faire émerger les talents polonais.
Le CCC Team qui participe au 76e Tour de Pologne parle essentiellement polonais, avec dans ses rangs Kamil Gradek, Jakub Mareczko, Lukasz Owsian et le Champion du Monde UCI 2018 de l’Omnium Szymon Sajnok. Ils côtoient dans l’effectif de sept coureurs l’Allemand Simon Geschke et le Belge Serge Pauwels qui sortent juste du Tour de France, ainsi que le Portugais Antero Antunes. Mareczko est Italien, mais il est né en Pologne, à Jaroslaw. Il parle parfaitement le polonais. Sprinter d’avenir qui compte des dizaines de victoires en Asie et plusieurs places de deuxième au Giro d’Italia, il a terminé sixième du premier sprint royal du Tour de Pologne, remporté à Cracovie par Pascal Ackermann devant Fernando Gaviria et Fabio Jakobsen.
« Courir devant les fans polonais, sur nos routes et en représentant notre sponsor en tant que premier UCI WorldTeam polonais dans la course la plus prestigieuse de Pologne est très excitant pour nous », s’est réjoui Piotr Wadecki, le Directeur Sportif. C’est le message d’une vraie nation cycliste.