À la veille de la deuxième édition de ces Championnats du Monde, nous avons échangé avec le Président de l’UCI David Lappartient, récemment élu au Comité International Olympique (CIO) et Président du groupe de liaison du CIO sur l’esport et les jeux vidéo depuis 2018.
Comment vous sentez-vous à l’approche de cette deuxième édition des Championnats du Monde Cyclisme Esport UCI ?
David Lappartient : Je suis impatient. La création de ces Championnats du Monde Cyclisme Esport UCI était l’un des objectifs avancés dans mon Agenda 2020 lors de ma première élection à la présidence de l’UCI.
La première édition, en décembre 2020, a été un franc succès. Les deux épreuves ont été remportées par Ashleigh Moolman Pasio, l’une des meilleures athlètes au monde, et par Jason Osborne, un rameur inconnu dans le monde du cyclisme. Après sa victoire, l’équipe Deceuninck – Quick- Step lui a proposé un contrat. L’histoire est belle. Vous avez d’un côté une athlète sud-africaine très connue et de l’autre ce rameur allemand, qui se voit offrir un contrat pour courir avec la meilleure équipe au monde. Ces histoires rendent ces Championnats du Monde vraiment spéciaux. Je suis certain que nous découvrirons de vrais talents ce week-end. Nous aurons de superbes Championnats du Monde.
Quel est l’objectif des Championnats du Monde Cyclisme Esport UCI : détecter des talents ou sacrer les meilleurs athlètes au monde ?
DL : Les deux. Participer aux Championnats du Monde Cyclisme Esport UCI est déjà un exploit en soi. Les coureurs se qualifient et visent le maillot arc-en-ciel. Mais la beauté de cet événement, c’est que des athlètes reconnus ou de nouveaux talents peuvent s’imposer. Il y a plus de surprises que sur nos autres Championnats du Monde où même si les vainqueurs sont un peu inattendus, ce sont toujours des athlètes confirmés et connus du grand public.
Quel est le rôle du cyclisme esport pour le cyclisme ?
DL : Le cyclisme esport ne remplacera jamais le cyclisme traditionnel, mais il nous permet d’atteindre une autre population. Par exemple, la plateforme Zwift totalise plus de comptes que nos Fédérations Nationales n’ont de cyclistes licenciés. C’est donc une possibilité pour nos 201 Fédérations Nationales de se développer, de s’élargir en touchant de nouvelles audiences.
Vous êtes Président du groupe de liaison du CIO sur l’esport et les jeux vidéo depuis sa création en 2018. En quoi cela consiste-t-il ?
DL : Le CIO a fait le constat qu’un des enjeux de demain est de renouveler et de rajeunir les audiences. Le groupe de liaison sur l’esport et les jeux vidéo a été formé à la suite d’un sommet, pour explorer les différentes possibilités et nouveautés actuelles au sein l’esport et des jeux vidéo. Au départ, nous nous sommes penchés sur les jeux vidéo, mais cet univers s’écarte un peu du monde de l’Olympisme ainsi que de ses valeurs et de sa philosophie. C’est pourquoi nous avons décidé de nous concentrer sur les sports physiques virtuels. Nous continuons à travailler avec le monde des jeux vidéo, mais pour les sports olympiques ou les sports réglementés par une Fédération Internationale.
Dans l’Agenda 2020+5 du CIO, la recommandation n° 9 laisse la porte ouverte à l’ajout de certains sports virtuels au programme des Jeux Olympiques...L’année dernière, les premières Olympic Virtual Series se sont tenues avec au programme cyclisme ; baseball-softball, aviron, voile et sport automobile. Cette année le programme de la deuxième édition en novembre affiche six ou sept sports. Là encore, l’idée est d’encourager la participation.
Quels sont les avantages du cyclisme dans l’esport ?
DL : Nous avons cette chance d’avoir un sport qui est virtuel et physique à la fois. Vous devez prendre une douche après votre course ! Pour le football par exemple, l’esport est plus penché vers le jeu vidéo., c’est difficile de jouer seul chez soi avec un ballon de foot, vous allez tirer dans l’écran. Et pour la natation, vous n’allez pas nager dans votre baignoire. C’est plus compliqué.
Que ce soit de l’esport actif ou des jeux vidéo, les gens souhaitent essayer. La pandémie du Covid-19, a créé un réel engouement autour du cyclisme esport.
Pendant vos années d’athlète et vos premières années dans la gouvernance du sport, pensiez-vous qu’un jour le cyclisme esport serait aussi populaire ?
DL : Jamais ! C’est une révolution, c’est extraordinaire. On faisait du home trainer, mais ça s’arrêtait là. Aujourd’hui, on peut pédaler dans son garage et se faire doubler par un pro. On peut rouler avec des personnes à l’autre bout du monde et on peut inviter des amis pour pédaler ensemble.
Les possibilités sont infinies. Avec toute la technologie qui voit le jour, peut-être pourrons-nous un jour participer sur le parcours des Jeux Olympiques... Imaginez un peu, si vous pouviez vous retrouver à l’écran de la course en ligne des Jeux Olympiques en roulant entre Alaphilippe et Van Aerts. Ils iront vite, bien évidemment, donc vous utiliserez votre booster de 20 ou 30 %. Ce n’est pas pour aujourd’hui, mais c’est imaginable pour demain !